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Le 04 janvier 2019

Projet de décret relatif à la mise en œuvre d’un fichier national biométrique des mineurs non accompagnés

La Voix De l’Enfant, dont le but est «  l’écoute et la défense de tout enfant en détresse, quel qu’il soit, où qu’il soit » , s’inquiète de la teneur du projet de décret relatif au fichage des mineurs non accompagnés et dénonce fermement ce qu’il prévoit, considérant qu’un mineur non accompagné doit avant tout être considéré comme un enfant à protéger et non comme un migrant à expulser.

À la suite de la promulgation de la loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie, autrement appelée « loi asile et immigration », le 10 septembre 2018, dix associations ont rendu public un projet de décret d’application du Ministère de l’Intérieur relatif à l’évaluation des personnes se déclarant mineures et privées temporairement ou définitivement de la protection de leur famille et autorisant la création d’un traitement de données à caractère personnel relatif à ces personnes.

Il en résulte que ce texte aura pour effet de faciliter les départements à contester la minorité des jeunes qui sollicitent une protection, et a fortiori, prendre des mesures d’éloignement du territoire, et ce, au mépris du droit au respect de la vie privée et du droit à l’égalité.

Ce texte offre en effet la possibilité à l’Etat de prendre une mesure d’expulsion envers une jeune personne suite à une évaluation du département concluant à sa majorité. Pourtant, il est bien connu que les évaluations de minorité ne sont pas des procédés fiables. Dès lors, de véritables mineurs pourraient être expulsés à tort.

Les manières dont les départements procèdent pour évaluer ces jeunes ne sont pas homogènes sur tout le territoire, ainsi, l’équité entre les individus serait totalement exclue. De plus, les départements sont en capacité de procéder à une nouvelle évaluation, ce qui laisse sceptique quant au fond de ce texte qui est « d’éviter, en cas de changement de département, toute remise en cause d’une évaluation antérieure ayant conclu que le demandeur est bien mineur ».

Ce projet prévoit la création d’un fichier dénommé « Appui à l’Evaluation de la Minorité » dans lequel seront inscrites diverses données personnelles des jeunes telles que leurs empreintes, leur photographie, leur état civil, la référence de leurs documents d’identité, leur filiation, leur adresse, leur numéro de téléphone et la date et les conditions de leur arrivée en France.

Il n’est pas acceptable de prévoir que les données personnelles présentes dans ce fichier soient transférées systématiquement vers le fichier principal de gestion des étrangers lorsque la personne est évaluée comme majeure par le département.

En outre, il est inscrit que « en cas de refus de l’intéressé de communiquer toute donnée utile à son identification ou de communiquer ses données à caractère personnel, le Préfet en informe le Président du Conseil départemental chargé de l’évaluation ». Comme il a été rappelé par plusieurs associations, ce refus risque d’être interprété comme un aveu de majorité par le Préfet avec toutes les conséquences qui s’ensuivent, à savoir, une éventuelle mesure d’éloignement.

Il n’est pas non plus acceptable que le fichier VISABIO soit consultable par les préfectures pour vérifier l’âge et l’identité des jeunes, alors qu’il est connu que beaucoup de mineurs étrangers tentent d’obtenir un visa en se faisant passer pour des adultes avant de venir en Europe.

Il serait préférable de suivre les préconisations du Défenseur des droits qui recommande la nomination d’un administrateur ad-hoc ou d’un tuteur provisoire pour garantir un accès effectif des jeunes se disant mineurs à leurs droits.

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